Asie, Indonésie
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De car en car, de port en port – Jusqu’au Kawah Ijen

Episode 2

La route est longue entre Bromo et Ijen. Encore huit heures de car. Le paysage fait défiler le temps avec facilité et oublier l’inconfort ressenti. Le jour décline peu à peu, la jungle reprend ses droits, les plantations de café que nous traversons se teintent de bleu, les villages se font de plus en plus rares. Le regard dans le vide je me laisse bercer par les secousses du car quand soudain quelque chose m’interpelle. En lisière de forêt au milieu d’une déchetterie improvisée est accroupie une dame amaigrie. Elle fouille les détritus. Je ne sais pourquoi cette image s’est gravée en moi et m’a attristée. Mais tout comme le car continue sa route mes pensées se tournent ailleurs. Je suis peut-être la seule à avoir vu cette femme. D’autres ont été touchés par cet homme nu allongé sur le bord de la route. Furtifs instants qui restent gravés en nous. On n’oublie pas mais on met de côté, on évite d’y penser, ainsi va la vie.
Nous atteignons maintenant le village Sempol, au cœur de 3000 hectares de caféiers et sommes agréablement surpris par les petits jardins et potagers qui devancent chaque maison. Nous poussons la route un peu plus loin et arrivons à l’hôtel. Nous avons de vraies toilettes, un grand luxe. Quant à la douche, toujours un pommeau accroché au mur, mais cette fois pas de risque de se prendre les pieds dans la cuvette. Nous prenons un bref repas et partons nous coucher car demain réveil à 00h45 !
Pourquoi ? Et bien tout simplement parce que sur la route, lors d’un changement de car, on nous vanta ô combien il était important de débourser 150 000 roupies de plus pour voir les Blue Fires, phénomène qui n’a lieu qu’avant trois-quatre heures du matin. Après une rude négociation nous avons réussi à économiser 5 euros, de quoi se faire un bon resto à Bali.

Après deux bonnes heures de sommeil c’est avec quelques appréhensions que nous partons pour notre trekking sur le Kawah Ijen, ce volcan réputé pour ses émanations de soufre. Trois kilomètres de grimpette, dans le noir complet, une heure-et-demi de pur calvaire.
Bon j’exagère. Mais raide est la montée !
Ça doit maintenant faire une heure que l’on marche. La pente est ardue mais nous sommes en bonne voie. Elle se délasse, se fait plus plane et nous reprenons de l’élan. Un homme nous dépasse, un indonésien. Il nous dit de ne pas trop traîner ce serait dommage de s’être levées aussi tôt et de manquer le spectacle. Tout en progressant nous conversons un temps et arrivons au dessus du cratère qu’il faut maintenant descendre. C’est interdit aux touristes mais tout le monde le fait, et la police est loin nous a t-on dit. Il est encore très tôt, je viens d’escalader un volcan en pleine nuit, je ne réfléchis pas trop (ou peu), j’ai déjà payé, je suis le mouvement. Talonnées par deux autres visiteurs indonésiens nous entamons les hostilités, notre nouvel ami au nom imprononçable ouvrant la marche. Ni guide, ni porteur de soufre, je ne sais pas trop la fonction de cet homme mais il sait ce qu’il fait, connait le chemin et ses travers par cœur.

La descente est plus que raide, les cailloux se dérobent. Un pied devant l’autre, très lentement, je débute mon ascension, dérape, manque de m’exploser contre un rocher, c’est mal barré. Et puis cette satanée lampe-torche qui n’éclaire même pas le bout de mes pieds ! Hati-Hati me répète l’homme,  Careful! Oui merci je fais ce que je peux. Mais voyant que ma comparse est en difficulté elle aussi il nous prend en pitié et décide de nous aider. Enfin c’est bien plus qu’une simple aide. Il nous tient la main, nous porte presque, avec une patience à toute épreuve. On s’excuse, lui tord le bras, manque de l’entraîner dans notre chute, il ne bronche pas.
Une fois en bas, le spectacle est surprenant.

Averti, l’homme nous montre les bons spots, les endroits où nous pouvons faire de belles photos, et va jusqu’à prendre un de nos appareils pour aller photographier les Blue Fires de plus près. Il a un masque à gaz lui.
Il s’agit en réalité d’un phénomène assez inhabituel sur un volcan. Le soufre liquide et brûlant qui s’échappe des fissures du cratère sur les bords du lac s’enflamme au contact de l’air créant des flammes bleues pouvant atteindre cinq mètres de haut.
Nous avons de la chance, cette fois le vent est avec nous et déverse le gaz dans dans le sens opposé. Toute appréhension a disparu. J’essaie de prendre des photos mais il fait sombre, mon réflex n’est pas du tout coopératif, il rechigne et se bloque. Je persiste, me fâche et l’oblige à prendre quelque cliché mais il est résiste le bougre. La bataille n’est pas terminée mais il faut remonter, le vent tourne et le soleil ne va pas tarder. Je sors du cratère et suis celui qui semble être mon guide. Mon groupe doit être devant.

Le ciel s’éclaircit et prend des couleurs, le voile se lève sur le lac du cratère. Je reconnais enfin les images des documentaires. Je ne sais comment je me retrouve seule au milieu de la végétation mais continue ma route, il n’y a qu’un chemin, peu de chance que je me perde cette fois. Le cratère est sur ma gauche, les arbres sont secs comme givrés par le soufre. Une odeur forte se disperse avec le vent, je m’enfouis dans mon écharpe. Mais je suis désormais à terrain découvert, le soleil est en train de se lever, de rouge et d’ocre est désormais le paysage. Un peu plus loin, des gens sont assis et admirent la vue sans mot dire, je me joins à eux. C’est magnifique.

Ma comparse de voyage me rejoint. Perdues dans la contemplation, le temps passe et nous nous rendons compte de rien. Notre guide fais des signes, le groupe se rassemble, il est temps de redescendre. Mais léger problème, ce n’est finalement pas notre guide et ce n’est pas notre groupe. Nous cherchons du regard les nôtres. Personne. Mince.
Nous dévalons alors la pente du cratère. Ça glisse, c’est presque plus compliqué que de monter.Heureusement les porteurs de soufre que nous croisons, quand ils n’essaient pas de nous vendre des figurines en soufre, nous conseillent. « Tu poses tes pieds comme ça et tu avances comme ci, là où la terre est la plus ferme ». Effectivement c’est mieux.

Nous progressons mais toujours personne à l’horizon, nous accélérons encore. Puis nous croyons reconnaître les deux canadiennes du groupe. Ce sont bien elles, le reste du groupe est plus avant, ils sont redescendus après les Blue Fires et n’ont donc pas pu admirer le lever de soleil sur le cratère. Dommage pour eux…

A peine le temps de partager nos impressions il faut déjà repartir. Retour à Bali.

3 commentaires

  1. Avatar de dominique
    dominique dit

    encore super, souvenir inoubliable, vous êtes jolies, et se tromper de groupe ne m’étonne pas !!
    bon weekend bisous

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